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Apprécions le regretté frère camerounais Justin Wandja, dans sa poésie « Lettres » (Lettere)

 « Lettres » est une poésie en forme d’échange épistolaire entre Justin Wandja, immigré en Italie, et sa maman, restée au Cameroun.

 

LETTRES  

Mon fils,

Chaque jour je relis les lettres que tu m’écris,
Mais ça fait des années que je n’entend pas ta voix,
Et le dernier souvenir que j’ai de tes mains
Est lorsque tu m’as étreint et dit: ‘Adieu’.
«Fiston», t’avais-je dit, «pourquoi veux-tu abandonner
Ainsi ta famille, tes gens, ta terre?
Tu as toujours trouvé auprès de ta mère un abri,
Un plat de fonio, un lit quand tu étais fatigué.
Avec Oko’o tu as dansé à la fête du village,
Elle n’avait de regards et de sourire que pour toi
Regarde tes frères, tu es leur guide,
Et la terre de tes ancêtres a besoin de toi
».

Tu m’as répondu: «Maman, il n’y a aucun avenir ici pour moi,
L’avenir est en occident, là-bas on peut progresser 
J’irai à Rome, terre d’histoire et de civilisation:
Les chrétiens accueilleront les frères africains.
J’étudierai, je trouverai un bon emploi,
Et toi et mes frères ne manquerez de rien
».

Mon fils, ce qui nous manque c’est ton sourire
Ton pas joyeux quand tu allais au champ
Tes récits et tes chants le soir autour du feu. 
Et quand dans ce pays d’histoire et civilisation
Tu auras terminé tes études et trouvé ton travail,
Souviens-toi de nous et reviens dans la terre

d’Afrique.

Maman,

Je ne peux plus mentir, j’ai un très grand regret,
Tes mots reviennent sans cesse dans mes pensées,
Et le souvenir du pays et de nos gens 
Laisse souvent mon cœur malade de nostalgie.
Cette terre promise, cette terre de rêve,
Convoitée, et dont beaucoup rêveront encore 
S’est montrée ingrate envers ses frères étrangers
Et sa froideur pénètre dans le corps et l’âme.

Je passe mes journées – et c’est avec douleur que je te le dis,
Chère maman – seul, errant dans les rues,
Sans destination, sans un coin où rester,
Parmi les gens qui regardent, suspects ou curieux.
Nous sommes des étrangers, nous sommes des vagabonds,
Sans maison, sans travail, sans famille,
Sans papier, sans aucun droit,
Pas même celui de ne pas être tués impunément.

Combien aimerais-je revenir à jamais dans ma terre ancestrale,  
Danser avec Oko’o à la fête du village,
Jouer avec mes frères, leur raconter des histoires
Et chanter le soir autour du feu.
Mais j’ai honte de mendier un billet 
Et retourner chez mes gens, vaincu et abattu.

Maman, pardonne-moi, je préfère rester
Où personne ne me connait dans cette froide terre

d’Europe.

Justin Wandja (Février 1989)

 

ORIGINALE IN ITALIANO

 

Figlio mio,

ogni giorno rileggo le lettere che scrivi,

ma da due anni ormai non odo la tua voce,

e l’ultimo ricordo che ho delle tue mani

fu quando mi stringesti e mi dicesti: «Addio».

«Ragazzo mio», ti dissi, «perché vuoi abbandonare

 

così la famiglia, la tua gente, la tua terra?

Sempre da tua madre hai trovato un riparo,

un piatto di fonio

un letto se eri stanco.

Con Oko’o ballavi alla festa del villaggio,

 

i suoi sguardi e il suo sorriso non eran che per te.

Vedi i tuoi fratellini, tu sei la loro guida».

Mi rispondesti: «Mamma, qui per me non c’è futuro,

 

l’avvenire è in Occidente, là è possibile avanzare:

andrò a Roma, terra di storia e civiltà:

i cristiani accoglieranno i fratelli africani.

Studierò duramente, troverò un buon lavoro

 

e a te e ai miei fratelli non mancherà più nulla.

Figlio mio, quel che ci manca è solo il tuo sorriso,

il tuo passo gioioso quando andavi nei campi,

le tue storie e i tuoi canti la sera attorno al fuoco.

E quando in quel paese di storia e civiltà

avrai finito i tuoi studi, trovato il tuo lavoro,

ricordati di noi, e torna alla tua terra

d’Africa.

 

Madre mia.

Non posso più mentirti, il mio rimpianto è grande,

 

nel mio pensiero tornano sempre le tue parole,

e il ricordo del paese e della nostra gente

lascia spesso il mio cuore malato di nostalgia.

Questa terra promessa, questa terra sognata,

 

agognata, e che tanti sogneranno ancora

si è mostrata ingrata coi suoi fratelli stranieri

ed il suo freddo penetra nel corpo e nell’anima.

Passo le mie giornate – ed è un dolore dirlo

 

a te, madre mia cara – solitario, vagando

per strada, senza meta, senza un posto dove stare,

fra la gente che guarda, diffidente o incuriosita.

Noi siamo gli stranieri, noi siamo i vagabondi,

 

senza casa, lavoro, senza una famiglia,

senza le carte in regola, senza nessun diritto,

nemmeno quello di non essere uccisi impunemente.

Come vorrei tornare nella mia terra avita,

 

ballare con Oko’o alla festa del villaggio,

giocare coi miei fratelli, raccontare loro storie,

e cantare la sera attorno al focolare.

Ma ho vergogna ora a mendicare un passaggio

 

e tornare alla mia gente sconfitto ed avvilito.

Madre, perdonami, preferisco restare

dove nessuno mi conosce, in questa fredda terra

 

d’Europa.

 

 

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