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THE SAMARITANS: Interview à Hussein Kurji, créateur de la série kenyane sur les Ong-bidons!

Dis donc! C’est bidon!

Hussein Kurji est le créateur de la série «The Samaritans» pour Xeinium Productions, qui expose sa vision et explique pourquoi il est question de rhinocéros dans la série.

altInterview à Hussein Kurji, créateur de la série «The Samaritans» pour Xeinium Productions, qui expose sa vision et explique pourquoi il est question de rhinocéros dans la série. Vous avez aimé le ton satirique de Kaboul Kitchen? Alors The Samaritans devrait vous plaire! Ces derniers jours, cette pépite fait le buzz sur Internet, depuis que le blog Africa is a country a publié un post sur la production de cette série TV kenyane qui a le bon goût de critiquer avec humour les ONG et plus globalement certaines absurdités présentes dans le domaine du développement international. Ayant trouvé cet article/interview fort intéressant, j’ai fait le choix d’en publier une version traduite par mes soins. La version originale en anglais est disponible ICI.

Quiconque a travaillé ces dernières années dans le domaine du développement international pour le compte d’une organisation non-gouvernementale (ONG) a probablement vécu ceci; avoir:

1/ eu affaire à un consultant externe ou un supérieur envoyé depuis l’étranger pour « gérer » le field office en [Insérer n’importe quel Etat non-occidental. Précision : Ce field office peut se situer dans une capitale de n’importe quel Etat situé en dehors des Etats-Unis ou de l’Europe],
2/ été choqué par le manque d’éthique dans ces lieux d’intervention où le but est «d’aider les populations»,
3/ travaillé pour ou en interaction avec des ONG (large notion qui englobe toutes sortes d’organisations) qui agissent sans véritable objectif apparent.

Tout récemment, une nouvelle série TV a été créée afin de mettre en lumière certaines absurdités inhérentes au secteur de l’aide internationale. Ironiquement intitulée «The Samaritans», il s’agit d’une comédie centrée sur les difficultés – et les réjouissances – du monde des ONG. Créée par une compagnie de production d’origine kenyane, la série raconte les activités de «Aid for Aid», une ONG qui selon les mots de son créateur «ne fait rien».

Vous reconnaitrez certainement la palette des personnages retenus. Scott, le nouveau Directeur Pays de Aid for Aid, qui n’a aucune expérience au Kenya et commence par affirmer en guise d’introduction au tout début de l’épisode pilote: «Beaucoup se demanderont pourquoi j’ai demandé à obtenir ce poste… Je ne manque pas d’expérience, contrairement à ce que certains peuvent penser. J’ai travaillé dans l’association de ma mère depuis l’âge de 6 ans». Titulaire de deux masters américains suivis d’un stage, pourquoi ne devrait-il pas en effet être aux manettes de l’organisation? Le casting de la série compte également le stagiaire malmené, le Directeur-adjoint accro à toutes sortes de cachets, et bien sûr un employé qui appelle tout les femmes du bureau «chérie», etc…

Interview à Hussein Kurji, créateur de la série «The Samaritans» pour Xeinium Productions, qui expose sa vision et explique pourquoi il est question de rhinocéros dans la série.

Quelle a été votre inspiration pour créer cette série?

Le Kenya compte plus de 4 000 ONG enregistrées, et pendant des années j’ai entendu toutes sortes d’histoires par des amis ayant travaillé pour les ONG. Il m’a un jour été demandé de créer une série humoristique, et dans ma tête trottait l’idée de voir The Office adaptée à la sauce ONG. Toutes les folles histoires que j’ai entendues ne pourraient-elles pas faire une bonne comédie ?

Quelle a été l’histoire la plus folle que vous ayez entendu à propos d’une ONG?

J’ai entendu dire de la part de quelqu’un aux Etats-Unis qu’une organisation avait organisé une vente aux enchères afin de lever des fonds au profit des rhinocéros en voie de disparition, et l’objet de cette vente était une chasse au rhinocéros en Namibie (NDLR: Oui, cela est bien arrivé. CNN et l’émission Colbert Report l’ont même évoqué).

Ces folles histoires ne s’arrêtent jamais. Je crois que le fait que les ONG ne soient pas toujours ce qu’elles semblent être m’a sauté aux yeux lorsque je travaillais il y a quelques années dans un hôtel cinq étoiles à Nairobi. Tous ces gars étaient réunis autour d’une table en mangeant du homard et discutaient sur la manière de réduire la pauvreté. Il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond.

Quelles sont les avancées pour la série?

Cela fait maintenant deux ans que nous travaillons sur l’élaboration de cette série. Nous l’avons présentée au DISCOP Africa, une conférence internationale sur les productions télévisuelles qui s’est tenue en Afrique du Sud, et nous avons remporté la compétition qui s’y est tenue. Nous avons eu de bons retours des réseaux et des distributeurs, mais tous demandent à voir un épisode pilote complet.

Afin de lever des fonds, nous avons utilisé la plateforme Kickstarter. Paradoxalement, une ONG nous a également contacté, en nous indiquant avoir adoré l’idée et qu’ils désiraient mettre en lumière les problèmes soulevés, après quoi ils ont participé financièrement à la production. La diffusion a eu lieu en octobre 2013.

Depuis cette première diffusion, nous avons reçu beaucoup d’attention pour la diffusion de tous les épisodes, mais nous sommes toujours à la recherche de moyens pour le financement de la saison entière et sa distribution. Nous avons envisagé de la rendre disponible par location en ligne (VOD), mais le délai de disponibilité est de six mois pour Amazon, et Vimeo est couteux sans être pour autant accessible à tous. (Les deux premiers épisodes sont maintenant disponibles en location sur Vimeo pour 5$).

Comment avez-vous trouvé les différents acteurs?

Nous avons procédé au casting après avoir lancé un appel public, et nous avons également contacté des amis qui ont fait tourné l’information en ligne et par bouche à oreille. Plusieurs de nos acteurs ne sont pas professionnels. Par exemple, la personne qui joue le rôle de Scott a de l’expérience au sein des ONG. Mais il a surtout travaillé en coulisse en tant que réalisateur de documentaires – il est originaire d’Angleterre, c’est pourquoi il fait semblant d’avoir un accent américain pour nous. Mais nous avons également des actrices professionnelles, comme les personnes qui jouent les rôles de Martha (Allison Karuiki), Suze (Sarah Hassan) et Elizabeth (Fridah Muhundi). De plus, le personnage « Driver » a joué dans Out Of Africa.

Pourquoi pensez-vous que le genre comédie constitue une façon appropriée pour critiquer le manque de responsabilité dans le secteur des ONG?

La comédie reste de la comédie – Vous pouvez rendre les situations sérieuses plus accessibles et plus largement regardées si vous le faites au travers de la comédie. Je pense que le rire est le meilleur des remèdes, même si cela paraît cliché. La série a pour slogan « The Samaritans est une comédie sur une ONG qui ne fait rien », et nous pouvons exagérer la réalité au travers de la comédie. Et d’ailleurs, quelqu’un en Afghanistan m’a envoyé un email pour me dire « Nous n’avons pas de Scott dans notre bureau, mais il y a une ONG juste à coté qui en a un ».

Pensez-vous que les ONG perpétuent les inégalités?

Je ne sais pas si elles ont l’intention de perpétuer les inégalités, mais les ONG internationales – les plus importantes – sont empêtrées dans la bureaucratie. Le personnel est conscient que certains formalismes ou mécanismes ne fonctionnent pas, mais la machine est tellement grande – comment pouvez-vous changez cela ?

Un des thèmes retenus dans les extraits en ligne concerne l’idée selon laquelle certaines personnes qui travaillent au sein d’ONG sont touchées par le complexe du martyr, de sorte qu’elles pensent faire le bien mais conservent des habitudes qui perpétuent des problèmes – qu’il s’agisse par exemple de maltraiter le personnel, d’avoir des comportements d’adaptation malsains, etc… Comment cela apparait-il dans la série?

Nous faisons apparaître le complexe du martyr ou du sauveur dès le début avec le personnage de Scott. Parmi tous les autres, le personnage de Scott n’apprend ni ne grandit à mesure que la série avance. Il est assurément un martyr, en pensant qu’il sait tout.

Il commence à y avoir de plus en plus de débats au sein du développement international sur la responsabilité des ONG – de quelle manières les ONG devraient adopter des mécanismes qui donnent un pouvoir de décision aux populations qu’elles sont censées aider, évaluer leur impact de manière plus aboutie que le système d’évaluation des bailleurs de fonds. Cela transparait-il dans la série?

Nous faisons intervenir dès les premiers épisodes une ONG rivale – les gars de la porte d’à coté. Cette ONG est l’opposé complet de Aid for Aid – nous démontrons cela au travers de leur bonne gouvernance et de leur véritable prise de responsabilité auprès de toutes les parties prenantes. Et nous montrons comment cela fonctionne à merveille pour tout le monde.

Nous faisons également apparaître certaines absurdités comme la recherche de subventions auprès des bailleurs de fonds. L’histoire principale de la première saison met en scène la plus grande demande de subvention jamais demandée jusqu’alors par le bureau d’Aid for Aid à Nairobi. Dans le second épisode, ils doivent tout d’abord trouver un acronyme avant même de déterminer à quoi sera destinée la subvention. À mesure que la série avance, nous mettons en image les treize étapes voire plus qu’ils doivent affronter dans le cadre du processus de demande de subvention.

Quel résultat espérez-vous obtenir avec cette série?

Nous sommes le premier faux documentaire kenyan, et nous sommes très heureux des réactions que la série a suscité jusqu’à maintenant. Nous avons l’intention de créer du contenu local pour une diffusion à l’international, et nous espérons pour cela trouver des partenaires de co-production ainsi que des réseaux internationaux qui travaillerons avec nous tout au long de cette aventure.

Je voudrais que cela dure aussi longtemps que possible. Nous sommes conscients que nous critiquons une « grosse machine » et nous ne nous attendons pas à ce que la série puisse tout changer du jour au lendemain – mais nous souhaiterions qu’un dialogue soit initié, que le public en vienne à discuter et réfléchir dans quel contexte l’assistance fonctionne, et s’agissant des organisations défaillantes comment les amener à s’améliorer. Nous comptons également élaborer des sujets qui dépassent le cadre des ONG, et abordent davantage des problèmes relatifs au développement international.

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