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HONORINE MUNYOLE: Policière rd-congolaise chasseuse de violeurs à Bukavu

Honorine l’héroine!

Honorine Munyole rit beaucoup et aux éclats. Surtout de l’image de « femme difficile » que l’on a d’elle à Bukavu, la ville où elle commande l’unité de police en charge de la protection de l’enfance et de la famille. Mais rien ne la décourage : « Qu’on me haïsse ou pas, je continuerai à pourchasser les violeurs ».

altÀ la place du béret, une simple coupe de cheveux tissés. Pour une fois, Honorine n’est pas dans son habituel uniforme de policière. Des sourcils bien épilés, du vernis rose sur les ongles et des boucles d’oreille plaquées or, s’accordant parfaitement avec ses chainettes autour du cou. « Il m’arrive parfois de m’habiller autrement. D’ailleurs nous sommes en mars, le mois de la femme ! », plaisante-t-elle, s’esclaffant de rire.

« C’est l’image qui me colle à la peau »

La personnalité d’Honorine est loin de ce qu’on décrit dans les rue de Bukavu : ferme et sévère, parfois intraitable. Elle pousse un fou rire lorsqu’on le lui rapporte : « Malheureusement c’est l’image qui me colle à la peau. On me reproche de malmener les hommes, pourtant je ne fais que mon boulot : celui de traquer les récalcitrants face aux droits des enfants. » La responsable de l’unité en charge de la protection de l’enfance et de la famille au commissariat de police du Sud-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo, est intransigeante à ce sujet.

Accessible, Honorine reçoit des gens tous les jours et sans rendez-vous au commissariat, dans le quartier Labote de Bukavu. Des femmes pour la plupart. Dans un couloir obscur, quelques femmes attendent à l’extérieur du bureau. La majorité d’entre elles a l’air terrifié et triste. Elle se couvrent de pagnes, comme pour se protéger des exactions dont elles ont été victimes et qu’elles viennent dénoncer. « Ces femmes constituent la preuve qu’il existe toujours des abus contre les enfants et les femmes à Bukavu et dans le Sud-Kivu. Rien n’a changé », s’insurge-t-elle.

« Juste une aventure »

Honorine travaille au commissariat de police du Sud-Kivu depuis 1997, l’année charnière de sa vie : le dictateur Mobutu est chassé du pouvoir par l’Alliance des forces démocratique pour la libération du Congo (AFDL), l’ex-Zaïre devient la République démocratique du Congo, l’armée et la police recrutent. À l’époque, elle surprend son entourage en intégrant le corps de la police nationale : « Personne ne s’attendait à ce choix. C’était juste une aventure. J’avais envie de découvrir comment on devient femme policière. J’adorais les séries télévisées policières. Je voulais, au moins une fois, me trouver dans la situation », lâche-t-elle.

Le premier dossier de sa carrière sera celui du problème des enfants sorciers. A l’époque, des enfants sont accusés par des adultes de pratiquer la sorcellerie. Des églises de réveil exorcisent des mineurs jusqu’à maltraiter certains. Alors jeune commissaire, Honorine doit lutter contre ces violations. À chaque rapport de fait, elle enquête, interpelle et attaque en justice des pasteurs et des parents récalcitrants. « Avec l’aide de mes collègues, nous avons réussi à éradiquer le phénomène d’enfants sorciers à Bukavu. On ne parle presque plus jamais de cela », se félicite-t-elle.

Fonctionnaire fauchée

Avec le temps, l’ancienne commissaire apprentie est devenue une professionnelle avérée. « J’ai concentré mes efforts sur la lutte contre les violences sexuelles depuis un temps. Qu’on me haïsse ou pas, je continuerai à pourchasser les violeurs », lâche-t-elle. À Bukavu, les acteurs de la société civile félicitent les actions d’Honorine dans la lutte contre les violences sexuelles. Parmi eux, Angèle Birindwa, militante des droits des femmes dans le Sud-Kivu : « Elle est sensible et agit avec efficacité en ce qui concerne la répression de criminels. Grâce à elle, nous avons réussi à instaurer la peur dans le camps des violeurs. »

Aujourd’hui, Honorine est satisfaite du travail accompli, mais pas du sort réservé aux agents de l’ordre au Congo. « Nous sommes mal payés par le gouvernement. Les partenaires étrangers ont prit le rôle de l’état en nous défrayant », avoue-t-elle. Honorine reconnaît être en conflit avec sa fille aînée qui déteste le métier de policier, notamment à cause des faibles salaires. « Elle ne souhaite jamais faire le même métier que sa mère. Je crois qu’elle a raison. Elle est souvent renvoyée de l’école par faute de paiement de frais scolaires. Pourtant elle est la fille d’un colonel de la république », se lamente-t-elle.

Mais malgré sa situation financière précaire, Honorine est fière de ce qu’elle fait pour son pays. « Oui, c’est très difficile de faire ce métier au Congo, mais ce qui me réconforte c’est de servir mon pays à un moment crucial. L’histoire retiendra cela. J’encourage les jeunes générations à faire de même ».

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