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GHANA: Gestion des revenus pétroliers – Un cas d’école

Contrôle ton pétrole! 

Éviter le cercle vicieux de la « malédiction » pétrolière africaine. Le Ghana, nouveau venu sur le marché pétrolier, a adopté des lois et créé des institutions pour s’assurer que les revenus bénéficient au développement du pays.

altQuand les plates-formes pétrolières ont commencé le pompage du pétrole brut au large des côtes de la région occidentale du Ghana en décembre 2009, beaucoup espéraient voir leur niveau de vie s’améliorer et l’économie nationale se développer. Ils se demandaient s’il serait en mesure de déjouer la « malédiction » qui a si souvent frappé les industries minières et pétrolières du continent: pendant des dizaines d’années, ces activités ont souvent causé l’enrichissement d’une minuscule élite au détriment de la majorité qui s’appauvrissait, des distorsions économiques résultant de la mauvaise gestion des richesses, ou encore l’absence de réserve en prévision d’une éventuelle chute des prix des matières premières ou d’un assèchement des puits. Au Ghana, après un siècle d’extraction de l’or, la gestion des revenus miniers n’a rien d’exemplaire.

Pourtant, Steve Manteaw membre de la Plate-forme de la société civile ghanéenne sur le pétrole et le gaz (une coalition de groupes de la société civile chargée de promouvoir une gestion transparente et responsable des richesses pétrolières et minières) affirme que «le Ghana est sur la bonne voie».

Une loi innovante

Une Loi sur la gestion des revenus a été adoptée au Ghana plus d’un an après l’extraction du premier baril d’hydrocarbures du champ pétrolier de Jubilee, définissant clairement des mécanismes de collecte et de distribution des revenus du pétrole et indiquant quel pourcentage de ces revenus doit alimenter le budget annuel, ce qui doit être mis de côté pour les générations futures, et ce qui doit être investi en prévision des mauvais jours.

Les recettes pétrolières ont contribué à hauteur de 4% aux dépenses en capital du gouvernement en 2011. Ces fonds ont principalement financé des investissements dans l’infrastructure routière. Mais ils ont aussi permis un renforcement des capacités dans les secteurs du pétrole et du gaz et le remboursement des prêts, et contribué au développement de l’agriculture notamment des subventions destinées aux engrais.

Selon Emmanuel Kuyole, coordinateur pour l’Afrique du Revenue Watch Institute, organisme international à but non lucratif, «Sans cette loi, il serait pratiquement impossible de contrôler les recettes provenant de ce secteur».

Contrôle indépendant

Il est rare que des groupes de citoyens puissent donner leur avis sur l’exploitation des ressources naturelles en Afrique. C’est la raison pour laquelle les experts se félicitent de la création, dans le cadre de la loi ghanéenne sur les revenus pétroliers, d’une Commission de l’intérêt public et de la responsabilité. La commission sert de cadre au débat public sur la manière dont sont utilisés les revenus pétroliers.

Un rapport publié en mai dernier sur la production pétrolière en 2011 concluait ainsi que ses revenus offraient à l’Etat des avantages financiers importants, lui permettant de consacrer un supplément de fonds aux programmes de développement. Mais le rapport notait aussi que le gouvernement ne respectait pas pleinement les dispositions de la loi.

Des défis persistants

Il arrive souvent que les gouvernements africains n’aient pas les moyens de surveiller véritablement l’exploitation de leurs ressources, ce qui les empêche de déterminer avec précision la part des revenus qui leur revient. Le directeur de pays de la Banque mondiale au Ghana, Yusupha Crookes, expliquait récemment que «l’efficacité d’un régime fiscal minier dépend des moyens administratifs cumulés des institutions gouvernementales chargées de son application. L’important, est de disposer de systèmes et de processus qui permettent d’encadrer efficacement le paiement des taxes pétrolières, gazières ou minières, dans la mesure où le système d’imposition général risque lui-même de ne pas être assez efficace pour le secteur de l’extraction».

Kwaku Boa-Amponsem travaille à Boas and Associate, principal cabinet conseil de l’Initiative ghanéenne pour la transparence dans les industries extractives, qui rassemble plusieurs parties prenantes. Selon lui, le Ghana doit réfléchir non seulement à la manière dont est fixé le montant des impôts payés par les entreprises minières mais aussi à qui a le pouvoir de décision.

Parfois, il suffit simplement de clarifier la loi. Au Ghana, du fait des complexités que la   législation fiscale ajoute à la fixation des redevances minières, pendant des années, le taux payé par les entreprises était extrêmement bas. Après la révision de la loi l’année dernière, les impôts devraient augmenter de manière substantielle.

Nouveaux horizons

À travers toute l’Afrique, de nouveaux champs pétrolifères apparaissent: le Tchad, la Côte d’Ivoire, le Libéria et la Mauritanie ont tous découvert du pétrole en quantité suffisante pour le commercialiser. Ces deux dernières années, de nouvelles découvertes ont été faites en Angola, au Cameroun, au Gabon, au Niger et en Sierra Leone et d’importantes activités de prospection ont lieu dans plusieurs autres pays, notamment au Kenya et en Ouganda.

Pour Steve Manteaw, de la Plate-forme de la société civile ghanéenne sur le pétrole et le gaz, le Ghana et les pays africains producteurs de pétrole en général doivent tirer les leçons qui s’imposent.

«Là où les ressources naturelles ont été réellement utilisées pour transformer les économies et la vie des populations, les pays ont eux-mêmes participé activement au secteur, selon une démarche participative dans le cadre de   laquelle ils ont acheté des parts dans les entreprises de production ou réinvesti les revenus pour en exploiter les dividendes, comme au Botswana».

Après des décennies de production pétrolière et des milliards de dollars de recettes non comptabilisées, les Nigérians espèrent à leur tour que le nouveau fonds souverain mis en place par leur pays sera adéquatement géré et améliorera les conditions de vie de la population. L’Angola, 2ème pays producteur de pétrole du continent, envisage lui aussi de mettre en place un fonds identique.

De manière générale, résume Steve Manteaw, le Ghana a pris un bon départ et doit persister sur cette voie. Et de conclure: «Transférer au secteur minier ce que le Ghana a fait pour le pétrole, voilà comment devrait être géré à l’avenir l’ensemble des richesses générées par les vastes ressources naturelles du continent».

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