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CRISE BURKINABE: Sur Blaise Compaoré – L’ivoirienne Marie-Odette Lorougnon (FPI) écrit à François Hollande

Un discours « franc en soi » à François!  

Dans cette lettre ouverte, l’ex-député d’Attécoubé (Abidjan) et vice-présidente du Fpi, Mme Marie-Odette Lorougnon interpelle le chef de l’Etat français, François Hollande, sur son attitude ambigüe envers le dictateur, Blaise Compaoré, et la révolution populaire au Burkina Faso. 

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Monsieur le président,

Autant vous vous autorisez à vous immiscer dans les conflits et les crises en Afrique, autant je prends la liberté de vous adresser cette lettre ouverte. Mais avant, je voudrais rendre un vibrant hommage au peuple frère burkinabé qui vient de se débarrasser d’une dictature qui a disposé de lui pendant 27 longues années. Malheureusement, certains frères du peuple burkinabé ont payé cash l’entêtement du dictateur de Ouagadougou à se maintenir au pouvoir. A leurs familles, j’adresse toutes mes condoléances et ma compassion. Aux blessés, j’adresse mes vœux de prompt rétablissement.

Monsieur le président, j’en viens à présent au sujet. Je voudrais d’entrée de jeu vous signifier que je suis de ceux qui n’ont pas applaudi quand vous vous êtes immiscé dans la crise interne au Burkina-Faso, de façon aussi grave, aussi humiliante pour vous-même, pour la France, pour nous, Ivoiriens et pour l’Afrique toute entière.

Cette intrusion maladroite me fait saigner le cœur. Même si vous pensez que le fait d’avoir colonisé l’Afrique vous confère un droit inaliénable sur ses peuples ; et vous autorise encore et encore à régenter tout chez eux ; au point de vous ingérer dans leur politique intérieure et d’avoir le monopole d’exploitation de leurs ressources. Je réprouve cette façon de penser, cette façon de voir et cette façon d’agir.

Monsieur le président, justement concernant cette crise, vous étalez votre triomphe en confessant que vous avez mis tous les moyens pour faire sortir Blaise Compaoré et sa famille du Burkina- Faso. Et c’est encore vous qui avez choisi que ce soit la Côte d’Ivoire qui l’accueille.

Monsieur le président, je voudrais vous faire remarquer au passage que c’est ce  » bellicisme révoltant « , ce manque de respect, ce mépris pour les autres qui font que vous n’avez que la sympathie de moins de 15% seulement de vos concitoyens aujourd’hui.

Par ailleurs, dans l’affaire relative à la crise burkinabé, vous faites preuve d’une telle légèreté que votre action de sauvetage de Monsieur Blaise Compaoré, plutôt que de vous grandir vous déshonore durablement et vous discrédite davantage.

Monsieur le président, que vous choisissez de sauver Blaise Compaoré du lynchage de ses concitoyens révoltés, c’est votre droit. Mais que vous décidez de façon unilatérale, de choisir la Côte d’Ivoire pour accueillir Blaise Compaoré vous rend rétrograde. Car vous prenez un engagement aux dépens de la Côte d’Ivoire et des contribuables ivoiriens. Comme si la Côte d’Ivoire était votre chambre d’amis, un pays de réserve pour la France. Si tant est que vous êtes si généreux, pourquoi ne prenez-vous pas Blaise Compaoré pour l’envoyer en France ? Chez vous !

Monsieur le président, faire venir Blaise Compaoré en Côte d’Ivoire, alors que vous avez fait déporter à La Haye, Laurent Gbagbo, un fils de ce pays, manque terriblement de pertinence et de logique. Dans toutes ces actions, vous faites prévaloir (hélas) comme toujours votre réflexe d’impérialiste et de colonisateur impénitent dont l’existence dépend elle-même de l’existence des éternels colonisés.

Mais nous comprenons, Monsieur le président. Dans cette affaire comme dans bien d’autres, vous êtes le digne successeur de Monsieur Nicolas Sarkozy et de tous ses chefs d’Etats français qui ne parviennent pas à se débarrasser de leur complexe de colonisateur et qui s’agitent en foulant au pied la dignité et la souveraineté des peuples africains.

Monsieur le président, en pérennisant l’esprit de la colonisation, en vous comportant en territoire conquis dans les pays africains, vous faites preuve d’une cécité historique qui contrarie vos jugements et votre appréciation du monde. Vous commettez en même temps des fautes graves avec beaucoup de légèreté et de désinvolture. Et vos agitations causent malheureusement beaucoup trop de préjudices irréparables pour les communautés que vous méprisez avec autant d’énergie.

Monsieur le président, la Côte d’Ivoire pleure encore ses civils massacrés, ses filles et femmes enceintes égorgées par une rébellion conçue, élevée et entrainée sous la houlette de Blaise Compaoré. La Côte d’Ivoire a subi une rébellion à qui le président français, Nicolas Sarkozy a donné le pouvoir en bombardant le président Laurent Gbagbo. On peut dire que vous êtes dans la logique tracée par votre prédécesseur, une logique de cruauté, dénudée de bon sens et de discernement.

Au nom de cette logique, la France renverse elle-même un dictateur Laurent Gbagbo (à supposer qu’il le soit) à coups de bombes, mais déploie une énorme énergie pour trouver un asile doré à un autre dictateur, Blaise Compaoré.

Monsieur le président, avec ces attitudes de deux poids deux mesures ; avec autant de maladresse et d’inconduite, vous montrez une faiblesse d’esprit qui vous éloigne des égards et de la sympathie de tous, y compris de celle de vos propres compatriotes.

Je vous remercie de m’avoir accordé votre attention.

Marie-Odette Lorougnon,

Vice-présidente du FPI, Secrétaire nationale de l’OFFPI,

Ancien député à l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire

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