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CAMEROUN: Le rappeur Valsero chante pour l’alternance au pouvoir

La valse anti-pouvoir de Valsero

Grâce à ses textes qui dénoncent les maux qui minent le Cameroun, Valsero est devenu le porte-parole des jeunes. Malheureusement, sa liberté de ton fait que ses chansons sont censurées dans les médias publics du Cameroun.

« Je dis: Prési arrête ça! C’est ça ton travail. Oui, Incha Allah! Je le jure, quelqu’un d’autre fera le travail. Le peuple n’en peut plus, les jeunes en ont marre; on veut aussi goûter au goût du miel sinon on te barre« . Ce sont les paroles d’une chanson intitulée « Lettre au président », écrite par l’artiste musicien Gaston Abé, plus connu sous le nom d’artiste Valsero, un jeune de 34 ans.

« En écrivant cette lettre au président je voulais lui présenter la situation réelle des jeunes au Cameroun. Il y a deux poids deux mesures entre ce qui est dit et ce qui est fait sur le terrain, entre les projets annoncés en direction des jeunes et la réalisation de ces projets. Alors, je me suis dit que si je lui faisais moi-même un rapport de terrain des activités du gouvernement, ce serait plus crédible que celui que lui font ses ministres« , explique Valsero.

Valsero, est d’abord un jeune Camerounais qui rencontre les mêmes difficultés que les autres jeunes de ce pays. Il est détenteur d’un diplôme de Technicien des Travaux de télécommunication obtenu en 2000 à l’Ecole Nationale Supérieure des Postes du Cameroun. Malheureusement, Valsero a cherché en vain un emploi dans son domaine de formation. Grâce à son aisance au micro, il a fini par être présentateur d’émissions musicales à Magic Fm, Radio Siantou puis Satellite Fm, des radios locales.

A la radio, Valsero retrouve le goût pour la chanson Rap, une passion de jeunesse qu’il avait abandonnée en 1997, lorsqu’il a commencé ses études en télécommunications. En 2002, Valsero écrit la chanson Ce pays tue les jeunes, le reflet de sa frustration. Il y déverse sa colère contre les maux qui minent le Cameroun, à savoir le chômage, la corruption, le favoritisme, le trafic d’influence, la confiscation du pouvoir par les vieux.

Il écrit ensuite « Ne me parlez plus de ce pays« , puis sort l’album intitulé « Politikement instable« , dans lequel il s’adresse directement au président de la République et le met face à ses responsabilités.

« Je me trouvais politiquement instable. Je ne me retrouvais pas dans la politique mise en place par le gouvernement. Il y a un fort taux de chômage parmi les jeunes. Pendant ce temps des vieux confisquent le pouvoir et cumulent les postes de travail. Je parlais aussi de politiquement instable parce qu’on vit dans un pays où aucune politique n’est pensée, elle n’aboutit pas au développement. Elle n’aboutit qu’à positionner certaines personnes et à organiser le trafic d’influence« , explique Valsero, dans les chansons duquel beaucoup de jeunes se reconnaissent et trouvent en lui un porte-parole.

« J’admire surtout sa capacité à dire tout haut ce que beaucoup pensent mais n’osent pas dire par peur des représailles. Sa capacité à dire par exemple que le problème du Cameroun c’est Paul Biya qui a confisqué le pouvoir pendant 30 ans. Il détruit la jeunesse et il doit partir« , confie J-M. T, un étudiant de 22 ans.

Le fait de dire par exemple que le chef de l’Etat est un mauvais gestionnaire est considéré au Cameroun comme un « outrage à chef de l’Etat » et est passible d’emprisonnement.

Pourtant Valsero ose le dire et le redire: « Le problème du Cameroun, ce n’est pas les gens qui tournent autour du président, c’est le président lui-même. Il ne prend pas de décisions constructives. C’est lui le principal problème du Cameroun. La clé pour qu’on libère le Cameroun c’est qu’il faut virer le président. Mais, c’est compliqué pour nous parce que le président a décidé qu’il va mourir au pouvoir. Il n’a rien prévu pour partir de là. Il est peut être important qu’on se débrouille pour le faire partir de là. Mais pour cela, il faut que les jeunes aient la culture électorale. Il va falloir voter. »

Au Cameroun, cette liberté de ton à un prix à payer. Si Valsero n’a pas été arrêté, il a cependant été censuré. Il s’en offusque.

« L’album intitulé « Liberté pour l’Afrique » par exemple a été interdit de sortie au Cameroun. C’est ça qui est terrible quand on vit dans une dictature. Les dictateurs aiment bien vous bloquer dans la famine pour que tout ce qui fait preuve d’intelligence ne vous touche pas et ne vous intéresse pas. »

Aucune des chansons de Valsero ne passe dans les médias publics. Les organisateurs de concert hésitent à l’inviter. Ses albums sont plus facilement disponibles à l’étranger et sur internet qu’au Cameroun.

Tous ces obstacles ne découragent pas Valsero. Au contraire, il prépare la sortie prochaine d’un album encore plus virulent. Il va à nouveau interpeller le président de la République mais aussi sensibiliser les jeunes à voter massivement lors des élections législatives qui auront lieu en 2013.

Valsero est une anagramme de Serval, le nom d’un de ses héros de bande dessinée lorsqu’il était plus jeune.

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