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SENEGAL: Paix en Casamance – Macky Sall réussira-t-il là où ses prédécesseurs ont échoué?

La Casamance recommence?

Le président sénégalais, Macky Sall, a entamé une visite de 3 jours en Casamance. Cette visite fait suite à celle qu’il avait déjà effectuée en 2013 en Gambie dont l’implication est très importante pour la résolution de la crise casamançaise.

altRappelons que l’arrivée de Macky Sall au pouvoir avait suscité un immense espoir dans cette région sud du pays, à tel point que tout le monde s’était mis à parier sur un changement décisif de stratégie dans la gestion du dossier casamançais. Car, l’histoire de la Casamance, c’est d’abord l’histoire d’un conflit séculaire entre des mouvements dits indépendantistes et l’Etat sénégalais. Et, aux sources de ce conflit, il faut souligner la frustration des populations de cette région de ne pas bénéficier des immenses potentialités qu’elles portent en elles.

De surcroît, considérée comme le grenier du Sénégal, la Casamance, malgré tous les discours et toutes les promesses tenus par les dirigeants successifs du pays (Senghor, Diouf, Wade), est restée une région très enclavée, et coupée du reste du pays. Ainsi, les mouvements indépendantistes, surfant sur la fierté et la défense de l’identité culturelle des Casamançais, ont réussi leur entreprise de retournement psychologique des populations, en présentant l’Etat sénégalais comme le bouc émissaire parfait, jugé responsable de tous les maux et malheurs de leur région.

Et, très vite, on est passé d’un nationalisme culturel à un nationalisme politique marqué par une lutte armée en vue de l’obtention de «l’indépendance» de la Casamance. Or, l’Etat post-colonial sénégalais, «Etat jacobin de facture française», est prêt à tout entendre sauf le mot «indépendance». Face à la diabolisation dont cet Etat fut et reste encore l’objet par les divers mouvements indépendantistes casamançais, ses principaux dirigeants ont usé et abusé de la violence d’Etat. Depuis plus de 30 ans, la société casamançaise vit dans un «état de guerre permanent», ce qui a freiné considérablement les perspectives de développement économique de cette région. Aujourd’hui, après avoir pris acte des échecs de ses prédécesseurs, Macky Sall vient de lancer, à l’occasion de sa visite, un projet baptisé «Casamance, pôle de croissance».

Il a raison, car la première région touristique du Sénégal, la première région agricole, du fait des conflits successifs, accuse un retard colossal en termes de développement économique et social. A l’heure où l’Afrique tout entière cherche à s’insérer dans la mondialisation, que ses sociétés sont toutes emportées par ce vaste mouvement historique, prôner en Casamance le repli, le renfermement sur soi, au nom d’une hypothétique indépendance, c’est faire preuve de naïveté intellectuelle et politique. A l’heure actuelle, dans le monde, la primauté est à l’économique.

Evidemment, l’Etat sénégalais doit reconnaître la spécificité culturelle casamançaise. Sans quoi, il continuera de nourrir davantage le nationalisme casamançais. Quant aux mouvements dits indépendantistes qui ont établi depuis des lustres leurs bases opérationnelles en Guinée Bissau et en Gambie, le temps est venu d’admettre que le choix politique de «l’indépendance» est historiquement impossible, et qu’il constitue une déperdition d’énergie inutile. Et comme l’avait si bien dit Spinoza, «la guerre ne devrait jamais être entreprise qu’en vue de la paix». La Casamance a besoin de paix.

Mais cela ne peut devenir une réalité politique et sociale que si l’Etat sénégalais et les mouvements dits indépendantistes parviennent, enfin, à un règlement politique durable de cette crise. Oui, il faut trancher, une fois pour toutes, la question politique déroutante du statut de la Casamance. D’ailleurs, une large majorité de Casamançais souhaite que leur région appartienne à l’ensemble unitaire sénégalais, à condition qu’on lui accorde une réelle et large autonomie. Macky Sall, tout en tirant le meilleur parti de l’accalmie actuelle, grâce à la médiation menée par la communauté catholique Sant’Egidio, n’a pas droit à l’erreur. Car ses prédécesseurs n’ont brillé que dans l’art de duper les Casamançais, avec de belles paroles et de fumeuses promesses.

Cela dit, le développement de la Casamance, c’est d’abord l’affaire des Casamançais eux-mêmes. Mais avec cette visite, Macky Sall devra vite préciser sa stratégie de recherche pragmatique de la paix et du développement de la Casamance, une région qui navigue continuellement entre «guerre et paix».

Il appartient aux Casamançais d’accompagner sincèrement cette nouvelle vision stratégique du président Sall, en cessant de faire de la question du statut de leur région un objet de fanatisme quasi-religieux. Car leur région souffre d’une absence abyssale d’infrastructures telles que routes, aéroports et bateaux. Depuis le tragique naufrage du «Joola», l’isolement de la Casamance n’a cessé de s’accentuer.

Certes, le dossier casamançais est resté un casse-tête permanent pour tous les prédécesseurs de Macky Sall, et ses données profondes n’ont pas changé. Mais avec l’arrivée au pouvoir de Macky Sall, et avec le projet qu’il vient d’initier pour le développement de la Casamance, quelque chose a changé, quelque chose est en train de changer. On peut donc espérer qu’avec sa visite, un espoir de renaissance, un nouveau soleil se lève sur une Casamance encore traumatisée, divisée et déchirée, voire résignée.

Décidément, Macky Sall est condamné à réussir là où tous ses prédécesseurs ont échoué. Et s’il réussit, il aura le sentiment d’avoir réalisé politiquement quelque chose de grandiose.

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