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BURKINA – C.I.: Affaire Soro/Bassolé – Crever l’abcès dans la transparence

Enregistre…ment ou ment pas? 

S’il y a une affaire qui fait couler en ce moment beaucoup d’encre et de salive, aussi bien sur les bords de la lagune Ebrié que sur les rives du fleuve Kadiogo, c’est celle des écoutes téléphoniques qui mettent en cause le président de l’Assemblée nationale ivoirienne, Guillaume Soro, et le général Djibrill Bassolé, dernier ministre des Affaires étrangères de Blaise Compaoré et candidat recalé à l’élection présidentielle au Burkina Faso.  Si du côté burkinabè, les autorités ne sont pas passées par quatre chemins pour mettre le général Djibrill Bassolé aux arrêts bien avant la diffusion du document qui circule sur les réseaux sociaux, pour complicité présumée avec les putschistes de l’ex-RSP, du côté d’Abidjan, le Front populaire ivoirien (FPI) a demandé l’ouverture d’une enquête parlementaire. Et ce, pour faire la lumière sur les graves allégations qui sont faites, au-delà du coup d’Etat contre les institutions du Burkina Faso, sur la mort de Désiré Tagro, un proche de Laurent Gbagbo, mortellement touché lors de l’attaque du palais présidentiel qui a abouti à la capture du Woody, et sur celle de Ibrahim Coulibaly, ex-chef de guerre du commando invisible tombé en disgrâce et tué dans des conditions tout aussi obscures.

Il est de bonne guerre que le parti de l’ex-président ivoirien se saisisse d’une telle affaire. Et le président de l’Assemblée nationale ivoirienne directement visé, ne devrait pas s’en offusquer, lui qui ne demande qu’à être blanchi dans une affaire qu’il qualifie du reste de grossier montage. C’est donc l’occasion pour lui de laver son honneur pour rabattre le caquet à ses détracteurs. Au demeurant, s’il y parvenait, cela pourrait contribuer à réchauffer les relations diplomatiques entre le Burkina Faso et la Côte d’ivoire, en ce moment au plus mal.

Car, nul besoin d’être grand clerc pour observer que celles-ci ont pris un coup de froid, depuis l’insurrection populaire d’octobre 2014 qui a abouti à la perte du pouvoir par Blaise Compaoré dans les conditions que l’on sait. Et ce ne sont certainement pas des accusations de ce genre qui contribueraient à la décrispation au sommet, sans compter les ressentiments à la base au sein des populations. Disons-le tout net, à en juger par certains faits, l’atmosphère est trop polluée entre Abidjan et Ouagadougou, pour qu’on y ajoute d’autres problèmes comme celui des écoutes téléphoniques qui mettent en cause un des personnages-clé du pouvoir ivoirien. 

En effet, sauf erreur ou omission de notre part, le président Michel Kafando n’a pas officiellement félicité son homologue ivoirien pour sa réélection à la tête de l’Etat ivoirien. De leur côté, jusqu’à son échec, les autorités ivoiriennes ne se sont jamais mises dans une posture de dénonciation ni de condamnation ferme et officielle du coup d’Etat du général Diendéré, contrairement à plusieurs pays du continent et même en dehors, qui avaient, à la suite de l’Union africaine, condamné fermement ce putsch que l’organisation panafricaine avait même qualifié d’acte terroriste. Ceci pourrait-il bien expliquer cela ?

Guillaume Soro aura besoin de plus qu’un simple démenti pour convaincre de son innocence dans cette affaire. En tout cas, il y a nécessité de prendre cette affaire au sérieux des deux côtés et de travailler à crever l’abcès dans la transparence et dans le souci d’assainir les relations entre ces deux peuples voisins liés par l’histoire et la géographie.

Plus que le Burkina Faso qui est de toute évidence dans une position de victime, la Côte d’Ivoire gagnerait à s’investir dans l’élucidation de cette affaire. Surtout si elle n’a rien à se reprocher. D’autant plus que depuis l’insurrection populaire d’octobre 2014, les insurgés burkinabè ont le sentiment que les autorités ivoiriennes ont toujours vu d’un très mauvais œil, leur lutte pour la liberté et la démocratie. ADO lui-même ne faisant pratiquement pas mystère de son aversion pour cette insurrection. Car, nul n’ignore les relations qui liaient l’ex-homme fort du Burkina à l’enfant de Kong qui lui reste fortement redevable de son soutien pour son accession au pouvoir.

Et pourtant, pour briser le mur de glace, l’on ne peut pas dire que l’Exécutif de la Transition burkinabè ait été avare en tentatives de rapprochement, notamment à travers les visites du Premier ministre Yacouba Isaac Zida et même du président Kafando en Eburnie. Malheureusement, les autorités ivoiriennes ne semblent pas être allées au-delà des mots, pour traduire dans les actes leur soutien indéfectible à la Transition burkinabè. Autant de faits qui laissent songeur. Même si les populations sont suffisamment intelligentes pour distinguer les initiatives personnelles, fussent-elles de hauts responsables, des actes qui engagent la République entière.

Quant à Guillaume Soro, l’homme au cœur de la polémique, nul doute qu’il aura besoin de plus qu’un simple démenti pour convaincre de son innocence dans cette affaire. Que ce soit au Burkina Faso ou en Côte d’Ivoire, l’ex-chef rebelle a besoin de rassurer qu’il a définitivement rompu avec ses vieux réflexes et que trônant désormais au perchoir d’une institution aussi prestigieuse que l’Assemblée nationale, il a définitivement revêtu la camisole des démocrates bon teint. En tout cas, malgré ses dénégations, l’homme peine à convaincre dans certains milieux. Et pour ceux qui ont eu accès au fameux enregistrement, pour une imitation comme le soutiennent Guillaume Soro et ses partisans, elle semble suffisamment réussie pour semer l’émoi au sein des populations des deux pays et mettre le président de l’Assemblée nationale ivoirienne sur la sellette.

Aussi, bien plus qu’une enquête parlementaire, une enquête internationale ne serait-elle pas de trop, si elle peut permettre de faire la lumière sur cette affaire qui, si elle devait rester en l’état, continuerait à pourrir, peut-être pour longtemps encore, les relations entre deux peuples frères qui ne demandent qu’à vivre dans la paix, la concorde et le respect mutuel. En tout état de cause, les peuples ne sauraient être les otages de leurs dirigeants.

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